Dimanche 3 juillet 2016 :

Petit déjeuner à 6h. Lever du soleil incroyable pour notre départ en jeep du jour. L’étape du jour est prévue à midi et nous avons de la route. Le paysage est très différent du salar, on commence à découvrir le sud lipez. On s’arrête à San Juan de rosario au musée Kawsay Wasy (15 bolivars) où l’on découvre une exposition d’objets et d’ustensiles ayant appartenus aux civilisations passées. Les explications historiques et chronologiques sont très détaillées et des liens avec la civilisation égyptienne sont effectués, notamment leurs rapports au soleil et leur pratiques communes sur la déformation volontaire des cranes.  Un petit chemin nous mène ensuite vers un cimetière datant du XIIe siècle avec la présence de certains cranes dans des cavités. Notre chauffeur Johnny continue de chiquer la coca de bon matin, l’odeur remonte dans toute la voiture à chaque fois qu’il modifie son positionnement.

Les paysages montagneux confirment notre entrée dans l’Altiplano, plaine d’altitude, située au cœur de la cordillère des Andes. C’est la plus haute région habitée au monde après le plateau du Tibet qui s’étend sur près de 1 500 kilomètres de long entre l’Argentine, la Bolivie, le Pérou et le Chili. Départ à 11h30 pour l’étape du jour. On est à 4 200 m d’altitude et le terrain est très différent des jours précédents : sol non stable sablonneux et rocailleux. On commence à alterner marche et course à partir du km 5, l’effet de l’altitude se fait ressentir. Les paysages sont variés et on a hâte de changer de vallée pour découvrir la suivante qui sera certainement très  différente et encore plus belle. L’étape du jour est vallonnée et le vent est au rendez-vous. Après quelques flocons de neige, nous arrivons au bout de 14,7 km couru en 1h51m devant un hôtel placé au bord d’un lac bordé de flamants roses. IMG_3454

Pour 20 bolivars les 15 min, je me connecte au wifi pour donner quelques signes de vies à la famille et amis après 5 jours de détox numérique. Nous reprenons la route vers 14h30, il reste encore du chemin. Nous traversons plusieurs lagunes et la poussière dégagée par les 4 jeeps me fait penser à une étape d’un rallye.

On fait une pause devant l’arbre de pierre, le vent est impressionnant. Il s´agit d´une formation géomorphologique déclarée monument naturel, avec une hauteur de cinq mètres. C’est le résultat du travail de l’érosion de plusieurs millions d’années. Il a la même forme que certains rochers présents dans le désert blanc d’Egypte. Il se situe dans le grand désert de Siloli et marque l´entrée au parc national Eduardo Avaroa.

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On arrive vers 17h à la laguna Colorada. Ce lac salé se trouve près de la frontière avec le Chili à une altitude de 4 278 m. La coloration rouge de ses eaux est due à des sédiments de couleur rouge et aux pigments de certains types d’algues qui y vivent. Les tons de l’eau vont des nuances marrons jusqu’aux rouges intenses. C’est un lieu de reproduction pour les flamants des Andes.

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On arrive devant notre auberge située juste après l’office du tourisme. Après un thé pour se réchauffer, on se regroupe tous autour du poêle, la température est déjà négative. Il peut faire jusqu’à -30° en août. Une soupe et au lit, il est 20h : c’est le record du séjour.

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Lundi 4 juillet 2016 :

Réveil à 6h. Dulce de leche au petit déjeuner (confiture de lait), cela me rappelle mes vacances en Argentine. Superbe lever du soleil sur la laguna Colorada voisine, les couleurs sont impressionnantes. Nous continuons de rouler dans les grands espaces, on monte progressivement et la piste est toujours aussi accidentée. On contrôle l’altitude avec nos montres, nous venons de dépasser le Mont Blanc. On roule en direction de Le Sol de Mañana (Soleil du matin) qui est une zone désertique. Ce champ de geysers se trouve sur la route conduisant au salar de Chalviri à une altitude comprise entre 4 800 m et 5 000 m. La zone est caractérisée par une importante activité géothermique avec de nombreux geysers, fumerolles et mares de boue qui émettent des jets de vapeur et d’eau chaude à une hauteur comprise entre 10 et 50 m. C’est la première fois que j’aperçois ces phénomènes d’aussi près, on a l’impression d’être sur une autre planète. Les vapeurs s’élèvent dans le ciel dans une odeur de soufre, l’atmosphère est apocalyptique : la température des geysers peut approcher les 200°C.

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Changement de programme complet et improvisation, Christophe décide de lancer l’étape du jour à partir des geysers. Nous n’avons jamais été aussi haut pour courir et la ligne de départ est digne d’un film de science-fiction. La température est sans doute négative, le vent est très présent : j’espère l’avoir régulièrement dans le dos. Ca râle un peu dans le groupe mais on nous promet un bain chaud à l’arrivée après 10 km. Les premiers kilomètres sont difficiles, je sens l’altitude et le froid malgré mes 4 couches et mon pantalon de montagne. Le vent est favorable et le chemin est majoritairement en descente et assez stable. Au bout de 10 km à ma montre, toujours pas de jeep et aucune idée de l’arrivée. Michel et Mika habituellement largement devant nous attendent, Laurent n’est pas loin non plus. Je continue de m’hydrater et mange régulièrement. J’ai la forme et on garde un bon rythme avec Tiffany. On alterne marche rapide et course sur la fin du parcours, on a finalement fait 19,1 km bouclé en 2h14m soit presque le double que prévu initialement. Une jeep nous amène 3 km plus loin dans un bassin d’eau chaude à Polkes. Je rejoins David et Christophe qui sont arrivés depuis un moment, ils sont déjà dans l’eau proche de 40° (entrée à 6 bolivars). Les groupes arrivent au fur et à mesure et nous rejoignent dans le bassin. La vue est magique et il n’est pas rare de voir passer un flamant rose ou une vigogne.

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Il est déjà l’heure de repartir en direction de la laguna verde. La météo n’est pas en notre faveur, il fait très froid et le vent est toujours aussi présent. La vue est néanmoins incroyable et la couleur verte de son eau qui provient d’une forte concentration de cuivre dans ses sédiments laisse apparaître le volcan Licancabut en arrière-plan. Nous devions initialement procéder à son ascension jusqu’à 5 960 m (comme effectué par le groupe de l’année dernière). Le programme a été modifié et nous effectuerons l’ascension de l’Uturuncu. Il semble plus accessible et dépasse même les 6 000 m, on verra bien ce que nous réserve l’ascension de demain matin.

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A côté de la laguna Verde se trouve la laguna Bianca, ces deux lagunes se rejoignant par un petit détroit. Tout comme la verde, la laguna Bianca doit son nom aux minéraux  présents dans ses eaux. Sur le retour nous passons par le désert de Dali. Il doit son appellation à ses crêtes montagneuses arides et à ses vastes étendues de cailloux aux tons ocre clair, parsemées de rochers isolés, qui évoquent curieusement les paysages que le peintre Salvador Dali a fait figurer en arrière-plan d’un grand nombre de ses œuvres. On ne peut malheureusement plus y accéder depuis plusieurs années du fait du vandalisme régulier des rochers.

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On reprend la route ou l’on traverse de beaux canyons en direction de Quetena Chico, petit village où se situe notre auberge pour ce soir. On mange vers 18h, il faut reprendre des forces et être en forme pour demain matin et l’ascension. Christophe annonce les résultats définitifs du raid, en effet la dernière étape n’est pas chronométrée. On finit finalement 3ème équipe et 1ere équipe mixte avec Tiffany avec seulement 4min d’avance sur Christian et Michel. Coucher à 19h45.

Mardi 5 juillet 2016 :

Réveil à 4h pour un départ à 5h. Michel et Christian ont décidé de rester à l’hôtel. Environ 2h de route difficile effectuée de nuit. Johnny notre chauffeur n’est pas rassuré, c’est la première fois qu’il prend cette piste, il est souvent hésitant. Nous passons régulièrement des rivières gelées. La piste permettait d’exploiter des mines de souffre jusque dans les années 1990 et est considérée comme une des routes les plus hautes du monde.

L’Uturuncu culmine à 6 008 mètres, c’est un  volcan présentant des signes d’activité notamment sous la forme de fumerolles et de fréquent séisme. Malgré son altitude et son isolement, il est considéré comme facile d’accès, c’est probablement le sommet de plus de 6 000 mètres le plus facile à atteindre dans le monde car une partie peut se faire en véhicule motorisé. Reste ensuite environ une heure de marche. Nous arrivons à la fin de la route vers 7h à environ 5 500 m d’altitude. Il est temps de commencer à monter, il fait déjà très froid. A l’est, le soleil se lève déjà. Le sentier est bien marqué et relativement régulier, serpentant en larges zigzags la pente du volcan. Nous sommes en file indienne, trois groupes commencent à se former selon les niveaux. Il commence à faire vraiment très froid et le vent n’arrange rien. Après plusieurs virages, mon visage semble comme anesthésié et je ne sens presque plus le bout de mes pieds malgré mes deux paires de chaussettes.

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Je sens que mes gants sont légers, je sers fort mes bâtons et essayent de garder mes doigts en mouvement. Je n’ai pas froid au corps, c’est uniquement les extrémités qui sont limites. J’ai bien superposé les couches avec un collant par-dessous mon pantalon de montagne et quelques couches bien chaudes sous ma veste en Gore-Tex. Avec le souffle de ma respiration, je sens mon buff qui gèle. Le vent ne se calme pas, il redouble même, j’ai même parfois du mal à tenir debout. Je commence à être congelé, j’ai jamais eu aussi froid de ma vie, je m’accroche derrière le premier groupe. Un écart commence à se creuser avec le premier groupe constitué du guide, de Christophe, Mickael, Thomas et David. Le guide pense qu’il est plus raisonnable de rebrousser chemin du fait des mauvaises conditions climatiques. Il fait un signe à Christophe, la décision est rapidement prise : pas de risque, on redescend. L’Uturuncu a décidé que cela ne sera pas notre jour, il faut savoir être sage surtout si les éléments ne sont pas favorables.

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Je suis toujours frigorifié et décide de redescendre en courant, cela va me réchauffer. J’espère surtout retrouver rapidement les sensations de 3 de mes doigts de pied que je ne ressens plus depuis quelques minutes. Le chemin est simple et les véhicules nous attendent en contre-bas.

Je croise les regards fatigués de Tiffany et de Florence, j’ai trop froid pour les attendre. Lorsque le vent est défavorable, Christophe me conseille de marcher en arrière. Je double ensuite Didier qui a les sourcils gelés et des stalactites qui se sont formées au niveau des narines. Puis c’est le tour de Pierre et Laurence, bras dessus-bras dessous. Je continue de dévaler et arrive le premier dans la jeep. Je retrouve Ricky et lui fait état de la situation. D’autres groupes ne devraient pas tarder à arriver. Le thermomètre de la voiture affiche – 17°, je pense que nous avons approché les -30°. Je retire mes baskets de trail, pas adapté à ce froid et frottent rigoureusement mes doigts de pieds, je retrouve un peu de chaleur. Ricky ressent la crainte dans mon visage et lui précise qu’il faut qu’ils s’attendent à voir arriver des gens fatigués et congelés. Je suis soulagé quand je vois arriver tout le monde. Tiffany est soutenue par 3 personnes, ma binôme a souffert ce matin.

Nous redescendons rapidement. Les paysages sont magnifiques avec des teintes jaunâtres et verdâtres des premières lueurs du jour. Retour à 10h environ à l’auberge. On est tous content d’être rentré mais je ressens une sensation et atmosphère étrange. Je pense que nous avons bien fait de rebrousser chemin sinon il aurait pu y avoir des accidents. Mon équipement n’était pas adapté à ce froid extrême et une paire de chaussures de randonnées avec des grosses chaussettes et gants auraient été plus adaptés. C’est néanmoins une jolie expérience et nous sommes montés à 5 910 m.

Dernier repas de l’expédition avec notre équipe, nous remercions chaleureusement les deux cuisinières (surtout le chouchou Thomas qui avait des faveurs spéciales) ainsi que les chauffeurs. Un pourboire leur est remis.

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Départ vers midi, la route est longue pour rentrer à Uyuni. Elle l’est encore plus, Johnny a pris un chemin très exposé au vent et les autres chauffeurs lui demandent de rebrousser chemin. On rajoute au minimum 60 km à notre trajet du fait de l’état des routes et différentes pistes à emprunter. Ils conviennent d’un rendez-vous groupé à San Cristobal, le reste du groupe a eu le temps de faire une longue pause et de repartir. Sur les 40 derniers kilomètres, on sent Johnny fébrile. Il commence à avoir des moments de fatigue, il ne veut pas s’arrêter. La route a été longue et nous nous sommes tous levés à 4h ce matin. Mika lui donne la totale : pastille Isostar, barre de céréale et pâte de fruits. On arrive finalement entier 45 minutes après les autres voitures à l’hôtel d’Uyuni en ayant effectué une courte pause, il était temps d’arriver. Repas à l’hôtel avant de prendre un bus couchette pour la nuit.

Mercredi 6 juillet 2016 :

Arrivée à La Paz à 5h, changement de bus, il y a déjà des embouteillages. Nous nous dirigeons vers le site de la Cité du Soleil de Tiahuanaco. La civilisation de Tiwanaku est une civilisation pré-inca qui a dominé la moitié sud des Andes centrales entre le Vème siècle et le XIème siècle. Ce site archéologique est considérée comme un des plus importants de Bolivie, on parle même parfois du Machu Picchu bolivien. Le site ouvre à 9h, nous prenons un petit déjeuner dans un restaurant adjacent. Le patron nous fait la surprise de nous proposer une visite d’un petit temple avec des reliques et ossements. Ricky nous fait la traduction de son discours. Il nous parle du 21 juin, Le Willka Kuti ou Nouvel An andin et amazonien. C’est le début du solstice d’hiver et d’un nouveau cycle agricole. Les participants célèbrent l’Inti (le soleil) et la Pachamama (la Terre-mère) sous la protection du condor (gardien du ciel), du serpent (gardien du monde souterrain) et du puma (gardien du monde de la terre).

Tiwanaku, qui signifie la pierre au centre, est un lieu spirituel et politique. Le site est constitué de plusieurs ensembles avec de multiples terrasses et terre-pleins centraux. Le temple de Kalasasaya est un observatoire solaire où ils arrivèrent avec une grande exactitude à calculer les 365 jours d’une année ainsi que les changements de saison. Tout le temple est ainsi organisé en fonction de ce cycle solaire. Lors de chaque équinoxe, le soleil apparaît au centre de la porte d’entrée principale. On trouve 2 monolithes sur ce site : Ponce et Fraile qui portent le nom d’archéologues. Ils ont de fortes ressemblances avec ceux de l’île de Pâques.

A la fin de la visite, on salue tous chaleureusement notre excellent guide Ricky. Toujours de bonne humeur, sympathique et jouant parfaitement son rôle avec humour (vive les petits terroristes). Nous rejoignons alors la frontière pour notre retour au Pérou via Desaguadero. Longue file d’attente de plus d’une heure du côté bolivien, on a plus de chance côté Péruvien c’est rapide. On rejoint l’hôtel de Puno en début d’après-midi. J’en profite pour acheter mon ticket de bus pour mon départ demain en direction de Cuzco et faire les derniers achats. Rendez-vous à 19h dans le hall de l’hôtel pour la remise des récompenses du raid et notre dernier repas tous ensemble. On repart tous avec un maté bolivien en guise de trophée.

Un remerciement spécial pour Christophe, c’est un travail de titan d’organiser ce type événement. Je me sens particulièrement privilégié d’avoir participé à cette course à étape qui permet également de découvrir avec une autre approche une région et un pays. Nous avons traversé des paysages de rêves et des décors improbables que seule la nature peut nous réserver. Je remercie également mon binôme de choc Tiffany. Ce fut un plaisir de partager cette aventure en équipe. Elle a vraiment un mental de guerrière renforcé sans aucun doute après son combat contre la maladie du siècle remporté l’année dernière.

Dernier restaurant avec tout le groupe, on trinque tous autour d’un verre de Pisco Sour, apéritif obtenu après la distillation du fruit de la vigne, de citron vert, de sirop  de sucre de canne et de blanc d’œuf.

Jeudi 7 juillet 2016 :

Dernier petit déjeuner avec tout le groupe. Tous les concurrents repartent pour Puno et préparent leurs retours en France. De mon côté, je prolonge mes vacances au Pérou avec Christophe, Tiffany et les children jusqu’au Machu Picchu. Le retour en France est prévu pour le 18 juillet. Vous retrouverez la suite de mes aventures péruviennes dans un second carnet de voyage consacré au Pérou.

J’ai été ravi de rencontrer des sportifs provenant de plusieurs régions françaises et même de Belgique. Pour Didier, « on est d’ailleurs tous le belge de quelqu’un ». J’espère recroiser vos têtes lors de vos prochains passages dans la capitale, à l’occasion de courses ou peut être lors d’une autre organisation de la team globe trailers (planning et calendrier des évènements à suivre sur les réseaux sociaux et sur http://www.teamglobetrailers.com/)

Résultat par étape :

temps

Lien vers la vidéo de présentation de la Expedition Bolivian Race 2016 disponible sur youtube :

m.youtube.com/watch?v=Zx080DALL4U

Budget global de 2 950 € pour 24 jours :

Vol Aller Paris – Juliaca via Miami et Lima / Vol Retour Lima – Paris via Miam pour 950 €.

Prix du Raid : 1 350 € incluant la tenue Team Globe Trailers et l’assurance annuelle.

Argent dépensé sur place : 650 €.

Taux de change :

1 € = 7,6 boliviano.

1 € = 3,6 sol.

 

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